Quelle est l’importance du négoce de vins, en France ?

Rappel : Dans le cadre de l’activité de négoce, le négociant achète de la matière première qu’il vinifie, ou des cuvés vinifiées( vin en vrac), à un viticulteur.

Le négociant peut posséder, ou non, des parcelles.

Le viticulteur qui vend son raisin, peut être producteur de vins, qu’il commercialise en bouteilles.

 

Suite à un dossier sur le négoce, présenté dans la presse ; on peut considérer, qu’en moyenne, 60,5% des vins français commercialisés, sont issus du négoce.

 

Quels sont les facteurs, qui entrent en ligne de compte, dans la relation du négociant et de son fournisseur ?

 

Ils sont confrontés aux mêmes contraintes, que tous commerces engendrent : Le viticulteur veut vendre son produit au meilleur prix (le plus haut), dans les meilleures conditions (délai de paiement raisonnable).

Et le négociant veut acheter au plus bas, et payer le plus tard possible.

Vu sous cet angle, je ne sais pas ce que vous en pensez, mais ce n’est pas joyeux.

Et la cerise sur le gâteau, la majeure partie des accords sont verbaux, quand ils sont respectés, cela se passe bien, quand ce n’est pas le cas, pas ou peu de recours...

Essayons de ne pas noircir le tableau et de voir région par région, ce qu’il en est…

 

Les régions, dont la part de négoce est inférieure à 60%

 

Ceux qui sont globalement satisfaits par les échanges avec le négoce :

 

La Provence est heureuse et comblée. Négociants et producteurs travaillent main dans la main, dans le même sens. Les vins rosés sont le moteur de la région, leurs ventes progressent régulièrement, leur santé économique est bonne. Ils ont fait front commun, contre la proposition de coupage, de la commission Européenne. Ils sont également partenaires, concernant le projet d’une AOC de vin rosé effervescent.

J’aime bien la citation suivante, de l’article : « on est d’abord provençal, avant d’être négociant ou producteur ». Tout est dit, ils pensent au bien régional, au lieu de privilégié leur statut, leur situation personnelle. La vision d’ensemble prévaut sur l’individualisme.

Le négoce, c’est quand même 58% des vins commercialisés, les premiers acheteurs sont : Listel (groupe Vranken), Castel et le Cercle des vignerons de Provence.

 

La sous-région Centre bénéficie également d’une excellente situation. Le négoce représente 46% des ventes, dont 94% est du négoce local, établi depuis très longtemps entre chaque partie. Ces négociants sont d’abord propriétaire, ici malgré des accords verbaux, chacun y trouve son compte, les prix sont corrects et stables. En résumé, de nombreux propriétaires ne peuvent écouler la totalité de leur production en bouteilles, c’est pourquoi le négoce est nécessaire et les avantage. Les producteurs répartissent leurs ventes telles que : un tiers vendu en bouteilles (valorisation du domaine), un tiers vendu au négoce (ici, il paie vite) et le dernier tiers est destiné aux caves coopératives (elles paient moins vite, mais à un prix plus élevé). Ainsi, on comprend aisément, pourquoi tout le monde est content. Producteurs et négociants ont su construire une relation saine et constructive, pour le long terme, où chacun a un rôle valorisé, respecté et récompensé.

Le podium est occupé par : La Maison Henri Bourgeois, la Maison Joseph Mellot et les Domaines Guy Saget et Fouassier.

 

L’île de Beauté est la région, où il y a le moins de négoce. Il correspond à 30% des ventes de vins de Pays et à moins de 10% des AOC commercialisées.

Le trio de tête : Trilles (filiale du groupe Val d’Orbieu), Grands chais de France et Castel. Ici la marge de manœuvre est limitée, il y a peu de vignerons et de surfaces cultivées, cultivables… Aussi, le négoce achète moins de volumes, qu’il ne le souhaiterait. C’est pourquoi, le cours des vins de pays est assez élevé, pour ne pas dire le plus élevé de France.

 

L’Alsace, c’est 43% de négoces, les 3 premiers acheteurs sont : Vins Biecher et fils, Bestheim, et Hauller.  Cette région fait partie de celles, dont les négociants sont souvent propriétaires de parcelles, aussi ils comprennent bien les difficultés des vignerons, facilitant leur relation et échanges commerciaux.

L’interprofession essaye de régulariser l’activité de négoce, par l’obligation de contrats écrits, cependant les mauvaises habitudes persistent…

 

La situation du Jura est assez proche de celle de l’Alsace, dans cette région la part du négoce est de 38%. Le plus gros négociant est : La Maison du Vigneron (filiale des Grands Chais de France). 

 

Il en est de même pour la Bourgogne, de nombreux propriétaires participent au négoce, soit parce qu’ils vendent, soit parce qu’ils achètent. Globalement la situation est bonne, cependant une inquiétude se profile sur la question du négoce pour l’appellation -Bourgogne-. Dernièrement, dans le Beaujolais, les producteurs ont obtenu l’autorisation de planter du Chardonnay, destiné à la production de bourgognes blancs. Ces producteurs ont également la possibilité de déclasser leur production de Crus en AOC Bourgogne rouge. Du coup, le prix de vente en Beaujolais, étant inférieur et concurrentiel, par rapport à celui des producteurs de la Bourgogne septentrionale, ces derniers craignent de voir s’effondrer les cours et d’être moins compétitifs. Leur crainte est justifiée, mais ils n’ont d’autre choix que d’affronter l’avenir, avec plus ou moins de sérénité, concrètement, on ne sait pas encore comment cela se passera.

Le négoce représente 55%  de la production, les trois plus grosses maisons sont : Boisset, Jadot et Latour.

 

En Anjou-Saumur, la relation est tendue mais amicale… Malgré des désaccords occasionnels, ils arrivent à trouver des solutions. Dans l’ensemble les prix satisfassent tout le monde, sauf peut être pour le Crémant de Loire, qui souhaiterait que les cours soient rehaussés. Depuis 2008, une grande partie des accords sont contractualisés, sans envenimer les échanges, signe positif qui laisse entrevoir de bonnes perspectives futures.

Part du négoce ; environ 52%, le plus gros et le plus connu : Ackerman, suivi de Besombes (groupe Loire Propriétés) et de Castel Loire.

 

Ceux qui vivent une situation difficile, presqu’au bord de la rupture :

 

La sous-région Touraine est confrontée à la situation inverse de sa voisine Centre. Elle souffre de tensions, presque irrémédiables actuellement entre le négoce et les producteurs. Les producteurs considèrent faire toujours des compromis sur les prix et les délais de paiement, tandis que le négoce leur en demanderait toujours plus…

Ils en sont à un point, où pour conserver leur liberté, et se sortir de leur dépendance, aux négociants régionaux, ils envisageraient de modifier totalement le contexte actuel, en développant davantage la communication et leur réseau de distribution, pour la vente directe en bouteilles. Tant qu’à faire du négoce, ils pensent à contacter des négociants extérieurs, d’autres régions…

Le négoce pèse 47% des ventes de l’AOC Touraine.

1er négociant : La Vinicole de Touraine, 2ème : Bougrier,  3ème : Chainier.


La Savoie : le déséquilibre entre offre et demande, suivant la couleur du vin, pèse sur les vignerons. Le blanc se vend très bien, mais l’offre est inférieure à la demande, et la situation inverse s’applique au rouge, l’offre est supérieure à la demande. Comment chacun peut-il s’y retrouver ? Sur cette base, les négociants tirent les prix vers le bas, obligeant certains viticulteurs à vendre à perte. Dans cette région, peu de producteurs commercialisent en direct en bouteilles, ils sont totalement dépendants du négoce. Les Caves coopératives les soutiennent peu, bradant elles-mêmes les prix, pour se décharger du rouge… La situation est difficile et compliquée, c’est indéniable, et aucun accord n’est contractualisé, les transactions d’achat ne sont mêmes pas enregistrées, auprès de l’interprofession, comme cela se fait ailleurs… Ce manque de transparence et de données, auprès de l’interprofession, ne lui permet pas d’envisager des stratégies de développement adaptées, à chaque partie, pour créer un avenir meilleur.

Le négoce commercialise 50% de la production (Maison Perrier, Maison Adrien Vacher et Maison Philippe Viallet)

 

A Cahors, d’après les viticulteurs, les cours seraient inférieurs aux couts de production, et d’après la cave coopérative, la plus importante de la région, les viticulteurs seraient payer « honnêtement », pour vivre de leur travail. Alors qui a tort, qui a raison ?  pas évident de trancher. Chacun a sa vision des choses et le manque de communication ne les aide pas pour établir les conditions d’un futur équilibré.

Le négoce c’est 52% des vins de Cahors vendus. Négociants : Rigal, RVSO, et Castel.

 

Cette première partie du Dossier sur le négoce national est close, suivra, dans le prochain article, la présentation des régions, où la part du négoce est supérieure à 60%.

 

Bonne journée

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