Suite, est ce que les vins rouges vieillissent prématurément ?

Suite à la présentation de l’étude réalisée par des chercheurs bordelais sur le vieillissement prématuré des vins, voici ma réflexion personnelle :

 

Je vous parle souvent des vins technologiques dont je caractérise les structures de lissées et les arômes de précoces. Et je suis régulièrement en quête des méthodes qui peuvent causer de tels résultats. Je m’efforce d’enquêter, de sonder, et de vous faire part régulièrement des conclusions que l’on peut en tirer.

Je ne peux affirmer que seul les vins « technologiques standardisés » possèdent des arômes précoces, donc des arômes de vins vieux, pourtant quelque part, je le pense.

Je n’ai que des hypothèses pour expliquer que ce résultat découle de tel ou tel choix lors des vinifications, pourtant j’y vois une certaine logique et cohérence.

 

Grâce à l’étude du Professeur Vincente Ferreira, présentée dans l’article « Quelle est la base aromatique du vin ? », on sait que non seulement il existe une seule base aromatique commune à tous les vins, mais aussi que l’expression des molécules aromatiques découle de la structure du vin.

Hors je rappelle, que le principal aspect que je dénonce et répugne dans l’œnologie moderne, c’est qu’elle est utilisée par l’homme pour manipuler le vin à sa guise, au lieu de le servir  dans le but de lui permettre de s’exprimer le plus et le mieux possible.

Un vin, normalement de « terroir », doit exprimer un caractère propre, qui le personnalise par des expressions structurelles et aromatiques, hors chacune de ces expressions personnelles dominantes peut être considérée comme un défaut aux yeux du vigneron, s’il les juge comme des obstacles pour que le vin plaise au plus grand nombre d’entre nous.

Si je n’ai pas été bien claire, je reformule ; plus un vin est marqué par des caractéristiques, plus il y a de chances, que les consommateurs soient critiques sur ce vin. Certains l’adoreront et d’autres le détesteront, parce que son caractère fort sera aussi bien perçu comme une source de plaisir que de déplaisir. Il n’y a pas de demi-mesure, un peu comme avec les gens entiers, ou quand on dit « ça passe ou ça casse »…

 

Maintenant prenons ce même vin de caractère, de « terroir », et grâce à des méthodes œnologiques, nous avons la possibilité en gros d’arrondir les angles : trop d’acidité, hop ! On en retire. Pas assez d’alcool, hop ! On rajoute un peu de sucres et on augmente le degré alcoolique. On veut un goût boisé, mais sans échange réel avec le bois pour faire un tanisage, hop ! Quelques copeaux dans la cuve. Trop de tanins, vin trop dur, hop ! On chauffe la vendange, ou alors on fait une petite micro-oxygénation pour oxyder légèrement prématurément le vin et assouplir les tanins….

 

Bref, je ne vais pas vous citer le nombre de choix dont dispose le vigneron pour manipuler le résultat de sa vendange, mais toujours est-il que même sans preuve scientifique, avec explication à l’appui, il y a des constats que l’on ne peut nier et qui ont forcément un lien entre eux.

 

Toutes ces méthodes influent sur la structure du vin et l’étude du Professeur Vincente Ferreira démontre clairement qu’il y a un lien de cause à effets entre la structure du vin et les molécules aromatiques et non l’inverse.

 

Donc au lieu d’identifier les molécules présentes, dont on sait déjà que les mêmes molécules sont présentes dans tous les vins, et que ce n’est que les autres composants du vin qui vont déterminer leur expression, il vaudrait peut être mieux que l’on étudie les autres composants, les structures du vin, pour essayer de déterminer de quoi elles découlent plus précisément.

 

Parce qu’on modifie les structures du vin, on voit apparaître des déviances aromatiques, si on suit la logique démontrée par le Professeur Vincente Ferreira.

Après tout, en réalisant des structures de vin « vieux » sur des vins jeunes, n’est-il pas cohérent que les arômes soient ceux d’un vin « vieux » alors qu’il est jeune.

Donc les vins ne vieillissent pas prématurément, parce que vieillir induit un facteur temporel qui ne concerne pas ces vins, puisqu’ils sont jeunes, ils sont produits pour être consommé jeune avec des fausses caractéristiques de vin « vieux ».

 

J’encourage les consommateurs de vins à réaliser de nombreuses expériences pour entraîner leur palais, pour se créer une mémoire olfactive et gustative, pour observer le vin et apprendre à le comprendre, si tenter que cela soit possible…

Mes plus beaux souvenirs sur le vin, concernent des expériences avec des vieux millésimes, parce que le temps leur avait été nécessaire pour se livrer en termes de finesse et de subtilité…

Dans tous mes articles qui traitent des vins de garde, je vous répète qu’un vin de garde est un vin « limite imbuvable » dans sa jeunesse, non parce qu’il a des défauts, mais parce que sa structure est imposante, impressionnante, énorme, pour notre fin palais, qui recherche la grâce et la douceur.

Je dis que très souvent ces vins possèdent beaucoup de tanins et d’acidité, et qu’en plus d’être très présents, ils sont jeunes, ils sont dur, et c’est le temps, l’évolution qui vont leur permettre de s’arrondir, de s’affiner, de devenir élégant. Un peu comme la chenille qui devient papillon.

 

Le fait est que les consommateurs ne veulent pas stocker du vin pour le consommer plus tard. Ils n’aiment pas les vins de garde, quand ils sont jeunes, parce qu’on ne leur a jamais expliqué qu’une structure puissante et dure, n’est pas un défaut.

Je voulais vous rappeler qu’après guerre, la seconde, les consommateurs de vins étaient nombreux à allonger le vin avec de l’eau. Pourquoi faisaient-ils cela ? Je pense que vous m’avez compris, il le faisait parce que les vins étaient trop durs et concentrés. Les vins, à cette époque, étaient presque tous de garde, entre le moment où les vins étaient produits et celui où ils étaient « bons » pour la consommation, il fallait bien consommer donc on allongeait les vins. Bien évidemment, nous ne sommes plus après guerre, je ne dis pas que les vins étaient « meilleurs » avant, je dis simplement qu’on faisait les vins autrement, on consommait autrement, et maintenant que nous sommes là, ne tient qu’à nous de faire les bons choix pour conserver une certaine éthique de production, et de consommation…

En conséquence, de ces changements de société, les vignerons se sont adaptés en produisant des vins qui peuvent être consommés jeunes.

Cela a un prix ; celui de perdre notre savoir-faire, nos traditions, notre patrimoine, la diversité, le respect du travail à la vigne, bref, je pense que nous payons très cher notre société de consommations, tout, tout de suite ! mais ce n’est que mon avis…

 

Bonne journée !

 

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